Le contentieux de la téléphonie mobile en 2013

Le contentieux de la téléphonie mobile en 2013

Le contentieux des antennes relais de téléphonie mobile devant le juge administratif est demeuré important en 2013.

Embryonnaire en 1997 lorsque j’ai commencé à assurer la défense de projets de stations téléphonie mobile, ce contentieux a connu une très forte croissante dans les années 2000 avec des développements à la fois en droit de la police administrative (ex. arrêtés de police interdisant l’implantation des antennes relais) et en droit de l’urbanisme (contentieux des autorisations d’urbanisme, POS/PLU).

Le Conseil d’Etat, le Tribunal des conflits ainsi que la Cour de cassation sont intervenus dans ce contentieux, signe de son acuité toute particulière.

A ce jour, les décisions du Tribunal des conflits en date du 14 mai 2012 n’ont pas modifié fondamentalement la physionomie du contentieux administratif (« Considérant que, par suite, l’action portée devant le juge judiciaire, quel qu’en soit le fondement, aux fins d’obtenir l’interruption de l’émission, l’interdiction de l’implantation, l’enlèvement ou le déplacement d’une station radioélectrique régulièrement autorisée et implantée sur une propriété privée ou sur le domaine public, au motif que son fonctionnement serait susceptible de compromettre la santé des personnes vivant dans le voisinage ou de provoquer des brouillages implique, en raison de son objet même, une immixtion dans l’exercice de la police spéciale dévolue aux autorités publiques compétentes en la matière ; que, nonobstant le fait que les titulaires d’autorisations soient des personnes morales de droit privé et ne soient pas chargés d’une mission de service public, le principe de la séparation des pouvoirs s’oppose à ce que le juge judiciaire, auquel il serait ainsi demandé de contrôler les conditions d’utilisation des fréquences radioélectriques au regard des nécessités d’éviter les brouillages préjudiciables et de protéger la santé publique et, partant, de substituer, à cet égard, sa propre appréciation à celle que l’autorité administrative a portée sur les mêmes risques ainsi que, le cas échéant, de priver d’effet les autorisations que celle-ci a délivrées, soit compétent pour connaître d’une telle action ; Considérant, en revanche, que le juge judiciaire reste compétent, sous réserve d’une éventuelle question préjudicielle, pour connaître des litiges opposant un opérateur de communications électroniques à des usagers ou à des tiers, d’une part, aux fins d’indemnisation des dommages causés par l’implantation ou le fonctionnement d’une station radioélectrique qui n’a pas le caractère d’un ouvrage public, d’autre part, aux fins de faire cesser les troubles anormaux de voisinage liés à une implantation irrégulière ou un fonctionnement non conforme aux prescriptions administratives ou à la preuve de nuisances et inconvénients anormaux autres que ceux afférents à la protection de la santé publique et aux brouillages préjudiciables », req. n°C3850).

Le billet qui suit présente sommairement des décisions obtenues pour un opérateur de téléphonie mobile devant les juridictions administratives au cours de l’année qui vient de s’achever. Il n’a pas vocation à être exhaustif mais simplement à mentionner des ordonnances de référé, jugements, arrêts ou décisions présentant un intérêt pour la matière, d’abord d’un point de vue contentieux (I.) puis sur le fond du droit (II.).

I. Problématiques de contentieux administratif

1. Tribunal administratif de Poitiers, référé, 2 mai 2013, Bourrieau / Cne de Sainte-Marie-de-Ré, req. n°1202676

Dans cette affaire, le riverain d’un projet de station de base contestait la décision de non-opposition à déclaration préalable dont bénéficiait un opérateur.

Il faut de suite préciser que le requérant attaquait en réalité le certificat de non opposition prévu à l’article R. 424-13 du code de l’urbanisme mais qu’il devait être regardé comme ayant entendu critiquer la décision constatée par ce certificat (Conseil d’Etat, 12 décembre 2012, SCEA Pochon, req. n°339220).

Parmi ses pièces, le requérant produisait plusieurs courriers adressés à diverses autorités administratives pour faire part de son opposition au projet.

Au nombre de ces éléments figurait un courrier envoyé au préfet de département pour lui demander de « faire respecter la loi ».

L’opérateur concerné avait alors soutenu devant le Juge des référés que ce courrier devait être qualifié de demande de déféré préfectoral provoqué au sens des dispositions de l’article L. 2131-8 du CGCT et qu’il aurait donc dû faire l’objet de la notification prévue à l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme (Cour administrative d’appel de Paris, 6 novembre 2003, Sté Metin Brie, req. n°00PA01250).

Le juge des référés de Poitiers a admis cette qualification de demande de déféré puis relevé que l’exigence de notification était parfaitement opposable au requérant mais n’avait pas été respectée.

La requête a, dès lors, été rejetée comme irrecevable.

2. Tribunal administratif de Lille, 21 mars 2013, Thiriez / Cne de Toufflers, req. n°1001028

3. Tribunal administratif de Lyon, 12 décembre 2013, Merle / Cne de Saint-Just-la-Pendue, req. n°1201990

A l’occasion de deux contentieux introduits par des tiers contre des projets distincts de stations de téléphonie mobile, l’opérateur en cause avait soulevé une fin de non-recevoir tirée du défaut de justification de l’intérêt pour agir des requérants.

Dans le jugement du 12 décembre 2013, le Tribunal administratif de Lyon précise que « les requérants n’ont produit ni titres de propriété ni pièce, de quelque nature que ce soit, permettant de localiser les parcelles en cause et d’apprécier, compte tenu notamment de la configuration des lieux et des caractéristiques des installations projetées, l’incidence que ces dernières pourraient avoir sur les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance des biens dont ils se disent propriétaires » puis ajoute « que la seule indication de leur adresse commune est à cet égard insuffisante ».

Tirant les conséquences d’une telle constatation – inspirée notamment des dispositions de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme issu de l’ordonnance n°2013-638 du 18 juillet 2013 – le Tribunal rejette la requête sur le terrain de l’irrecevabilité.

Dans l’autre affaire, tranchée par le Tribunal de Lille, les requérants avaient produits des justificatifs en réponse à la fin de non-recevoir mais uniquement à l’occasion d’une note en délibéré et seulement après avoir entendu le rapporteur public proposer un rejet pour irrecevabilité sur ce fondement.

Le Tribunal refuse de tenir compte de cette production tardive dès lors que la fin de non-recevoir était en débat bien plusieurs mois et que rien n’empêchait les requérants de justifier de leur qualité avant la clôture.

4. Tribunal administratif de Lille, 3 octobre 2013, Commune de Masny, req. n°1104713

Dans cette affaire était en cause l’action de la commune de Masny dirigée contre la décision de non opposition prise par le maire de la commune voisine d’Ecaillon concernant une station de téléphonie mobile à implanter sur une parcelle située à la limite entre ces deux communes.

La commune requérante invoquait les « nuisances susceptibles d’être produites par cet équipement sur les zones d’habitation relevant de son territoire et situées au voisinage immédiat du projet » et soutenait que le projet était situé à proximité d’une zone d’urbanisation future sur son territoire.

Reprenant une grille de lecture déjà connue de la qualité pour agir d’une collectivité locale contre l’acte d’une autre collectivité (Conseil d’Etat, 22 mai 2012, SNC SME Le Haut des Epinettes, req. n°326367), le Tribunal juge que les éléments invoqués par la requérante sont «sans incidence sur [sa] situation […] ou sur les intérêts dont elle a la charge ».

N’invoquant aucun intérêt propre, distinct des intérêts particuliers de ses résidents, « et seul de nature à lui donner qualité pour agir contre l’autorisation d’urbanisme querellée », la commune voit sa requête rejetée sur le terrain des questions préalables.

II. Problématiques de fond

1. Tribunal administratif de Montreuil, 7 février 2013, Société ORANGE FRANCE / Cne de Montreuil, req. n°1108502

L’opérateur de téléphonie mobile avait saisi le Tribunal administratif d’une requête en annulation dirigée contre un arrêté du maire de la commune de Montreuil en date du 2 août 2011 demandant qu’il soit sursis à toute installation ou modification d’antennes relais sur le territoire communal.

Le Tribunal constate qu’un tel arrêté équivaut à une interdiction d’implantation des antennes relais de téléphonie mobile.

Ce faisant, et après avoir repris le considérant de principe de trois décisions rendues par le Conseil d’Etat le 26 octobre 2011 (not. Conseil d’Etat, ass., 26 octobre 2011, Cne de Saint-Denis, req. n°326492) pour caractériser l’existence d’une police administrative spéciale des communications électroniques confiée aux seules autorités de l’Etat, le Tribunal juge « que le maire de la commune de Montreuil ne pouvait […] pas légalement demander à la société requérante de surseoir à toute installation ou modification sur son parc existant d’antennes relais de téléphonie mobile. »

2. Tribunal administratif de Montreuil, 21 mars 2013, Société ORANGE FRANCE / Cne de Sevran, req. n°1111476

3. Tribunal administratif de Versailles, 30 décembre 2013, Sté ORANGE FRANCE / Cne de Clamart, req. n°0910019

Dans ces deux affaires, se posait la question de la compétence des auteurs des plans locaux d’urbanisme pour réglementer l’implantation des antennes relais de téléphonie mobile au nom, pas uniquement de considérations urbanistiques, mais pour des motifs sanitaires liés au principe de précaution.

Suivant les conclusions de son rapporteur public et après avoir rappelé l’existence d’une police spéciale des communications électroniques organisant les conditions d’implantation et de fonctionnement des antennes relais, le juge de Montreuil censure le PLU de la commune de Montreuil fondé sur des considérations sanitaires.

Le juge versaillais s’engage pour sa part dans une autre voie et admet la possibilité de règlementer l’implantation des antennes relais dans un PLU au nom du principe de précaution.

Il fait toutefois immédiatement application de la grille d’application de ce principe posée par le Conseil d’Etat en matière d’autorisations individuelles d’occupation du sol (Conseil d’Etat, 30 janvier 2012, Sté Orange France / Cne de Noisy le Grand, req. n°s 344992 et 344993) pour juger que la règlementation litigieuse n’est fondée sur « aucun élément circonstancié de nature à établir l’existence, en l’état des connaissances scientifiques, d’un risque pouvant résulter, pour le public, de son exposition aux champs électromagnétiques émis par les antennes relais de téléphonie mobile. »

A noter également à propos du jugement du Tribunal administratif de Versailles :

Renvoyant expressément à un avis contentieux n°367023 rendu le 2 octobre 2013 par le Conseil d’Etat, le Tribunal administratif rappelle que « si le conseil municipal est seul compétent pour abroger tout ou partie du plan local d’urbanisme de la commune, c’est au maire qu’il revient d’inscrire cette question à l’ordre du jour d’une réunion du conseil municipal ; que, par suite, le maire a compétence pour rejeter une demande tendant à l’abrogation du plan local d’urbanisme ou de certaines de ses dispositions ; que, toutefois, il ne peut légalement prendre une telle décision que si les dispositions dont l’abrogation est sollicitée sont elles-mêmes légales ; que, dans l’hypothèse inverse, en effet, il est tenu d’inscrire la question à l’ordre du jour du conseil municipal, pour permettre à celui-ci, seul compétent pour ce faire, de prononcer l’abrogation des dispositions illégales ».

Ainsi, après avoir jugé que les dispositions litigieuses ne pouvaient figurer dans le PLU faute d’être étayées par des « éléments circonstanciés », le Tribunal considère que le maire était incompétent pour rejeter lui-même la demande d’abrogation du PLU et qu’il aurait dû en saisir son conseil municipal.

4. Cour administrative d’appel de Douai, 2 mai 2013, CROUS de l’Académie de Lille, req. n°12DA01577

Saisie sur renvoi du Conseil d’Etat (11 octobre 2012, Sté Orange France, req. n°351440), la Cour administrative d’appel de Douai devait statuer sur la requête du CROUS de Lille contre un jugement du Tribunal administratif de la même ville ayant annulé, à la demande d’un opérateur, une délibération de son conseil d’administration résiliant une convention d’occupation d’une dépendance de son domaine public.

S’inscrivant dans la lignée de la décision de renvoi, la Cour juge que si une résiliation de la convention domaniale est toujours possible pour un motif d’intérêt général, cette possibilité cède face à la stipulation contractuelle dans laquelle le CROUS s’engageait à rechercher une solution alternative permettant à l’opérateur de poursuivre son exploitation.

En l’espèce, il apparait que l’urgence invoquée par le CROUS à effectuer des travaux n’était pas avérée et que l’opérateur aurait pu déplacer ses équipements le temps des travaux. Une solution alternative était donc parfaitement possible et aurait dû être préférée à une résiliation.

Saisie de conclusions Béziers II (Conseil d’Etat, sect., 21 mars 2011, Cne de Béziers, req. n°304806), la Cour relève ensuite que la résiliation litigieuse est « constitutive d’une grave illégalité » de nature à porter atteinte aux propres intérêts de l’opérateur mais également « à l’intérêt général d’une bonne desserte en téléphonie mobile ».

Ce faisant, et après avoir donc rejeté la requête dirigée contre le jugement ayant fait droit à la demande de l’opérateur, elle enjoint au CROUS de Lille de reprendre les relations contractuelles sur les bases de la convention initiale et dans un délai d’un mois à compter de la notification de l’arrêt.

5. Tribunal administratif de Lille, référé, 26 juin 2013, Delplanque et autres, req. n°1303415

La condition d’urgence est traditionnellement regardée comme satisfaite « lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu’il entend défendre » (Conseil d’Etat, sect., 19 janvier 2001, Confédération Nationale des Radio Libre, req. n°228815).

Le juge des référés doit apprécier l’urgence de manière objective et concrète en effectuant un bilan de l’ensemble des intérêts en présence, qu’ils soient publics ou privés, et qu’ils aillent dans le sens d’une suspension de la mesure litigieuse ou au contraire de son exécution immédiate (Conseil d’Etat, sect., 28 février 2001, Préfet des Alpes Maritimes /Société Sud Est Assainissement, req. n°229562).

Il est constant qu’un intérêt public s’attache au déploiement des réseaux de téléphonie mobile (pour un rappel récent : Conseil d’Etat, 8 mars 2012, Sté Orange France / Cne de Réaumont, req. n°352013) et que le juge des référés doit dès lors tenir compte de cette donnée pour apprécier l’urgence.

C’est ainsi que le juge des référés de Lille, dans l’ordonnance ici évoquée, reconnait que l’intérêt public attaché à l’implantation du projet (et donc à l’exécution de l’acte) doit primer les intérêts invoqués par les requérants pour contester l’autorisation d’urbanisme.

La requête en référé des riverains est dès lors rejetée pour défaut d’urgence, nonobstant le fait que les travaux soient déjà en cours de réalisation.

6. Conseil d’Etat, 21 octobre 2013, Société Orange France / Cne d’Issy-le-Moulineaux, req. n°360481

Dans cette affaire se posait la question de la détermination des pièces exigibles au soutien d’une déclaration préalable et de la possibilité pour un maire de solliciter des pièces prévues par une législation étrangère au droit de l’urbanisme, en l’occurrence le code des postes et communications électroniques (CPCE).

Le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise avait (malgré les conclusions contraires de son rapporteur public) confirmé la légalité d’une opposition fondée sur l’absence de production de l’information prévue à l’article L. 96-1 du CPCE.

Le Conseil d’Etat censure cette solution.

Il réaffirme sa position sur le caractère limitatif des pièces prévues par les dispositions règlementaires du code de l’urbanisme (not. Conseil d’Etat, 1er décembre 2006, Cne de Saint-Denis / Sté Orange France, req. n°294131) et l’étanchéité complète qui existe entre instruction des demandes d’autorisation d’urbanisme et les procédures prévues par des législations étrangères (ici le CPCE), sans que le principe de précaution n’y change rien :

« 3. Considérant toutefois qu’aux termes de l’article L. 96-1 du code des postes et communications électroniques, en vigueur à la date de la décision attaquée : ” Toute personne qui exploite, sur le territoire d’une commune, une ou plusieurs installations radioélectriques est tenue de transmettre au maire de cette commune, sur sa demande, un dossier établissant l’état des lieux de cette ou de ces installations. Le contenu et les modalités de transmission de ce dossier sont définis par l’arrêté conjoint des ministres chargés des communications électroniques, de la communication, de la santé et de l’environnement ” ; que ces dispositions, qui visent les exploitants d’installations radioélectriques en fonctionnement, sont sans application dans le cadre de l’instruction des déclarations ou demandes d’autorisation d’urbanisme, pour lesquelles le contenu du dossier de demande est défini par les dispositions de la partie réglementaire du code de l’urbanisme ; que, par suite, en se fondant sur la circonstance que l’autorité d’urbanisme pouvait requérir, dans le cadre de l’instruction de la déclaration préalable déposée par le société Orange France, la production d’éléments supplémentaires après avoir constaté que le dossier qui lui avait été transmis au titre de l’article L. 96-1 n’aurait pas été complet, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ; que la société Orange France est, dès lors et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, fondée à demander l’annulation du jugement qu’elle attaque ».

Puis, statuant au fond, il considère « que ni les dispositions de l’article R. 431-36 du code de l’urbanisme, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire applicable n’exigent que soit jointe au dossier de la déclaration préalable de travaux une estimation du niveau maximum de champ électromagnétique reçu sous forme d’un pourcentage par rapport à la valeur de référence de la recommandation européenne ; que la Charte de l’environnement n’habilite pas, par elle-même, le maire d’une commune à exiger la production de documents non prévue par les textes législatifs ou réglementaires en vigueur, ni à instaurer une procédure, elle-même non prévue par les textes en vigueur ; que, par suite, le maire d’Issy-les-Moulineaux ne pouvait sans illégalité s’opposer aux travaux déclarés au motif de l’absence au dossier d’un tel document ».

7. Tribunal administratif de Caen, 5 novembre 2013, Société des courses du pays d’Auge, req. n°1201811

Le Tribunal administratif de Caen était saisi d’une décision de non opposition à déclaration préalable portant sur l’édification d’une station de téléphonie mobile et notamment de la question de savoir si un permis de construire était nécessaire pour ce projet.

En l’espèce, était en cause une décision de non opposition du 11 juillet 2012, soumise donc au régime des autorisations d’urbanisme entré en vigueur le 1er mars 2012 et issu de l’ordonnance n° 2011-1539 du 16 novembre 2011 relative à la définition des surfaces de plancher prises en compte dans le droit de l’urbanisme et du décret n° 2012-274 du 28 février 2012 corrigeant un décret n° 2011-2054 du 29 décembre 2011.

L’on sait que sous l’ancien régime des autorisations d’urbanisme, après des débats entre les juges du fond et malgré une position inverse de la doctrine administrative, le Conseil d’Etat avait pris position en faveur de la soumission d’un projet précis d’antenne relais à permis de construire.

Le débat était toutefois bien différent dans l’espèce soumis au juge de Caen puisque se posait la question de savoir si le projet entrait bien dans le champ de l’article R. 421-9 c) nouveau du code de l’urbanisme et créait de la surface de plancher et/ou de l’emprise au sol.

Le Tribunal valide la soumission du projet à déclaration préalable et rejette donc le moyen présenté par la requérante.

Il juge « qu’il ressort des pièces du dossier que le projet déclaré par la société Orange France consiste en l’implantation d’un pylône monotube de téléphonie mobile de 22 mètres de hauteur créant une emprise au sol de 0.42 m² avec des armoires techniques sur une plateforme et une dalle enterrée ; que ces éléments constituent un ensemble indissociable, ayant d’ailleurs fait l’objet d’une déclaration préalable unique ; que le projet, par sa nature, ne crée pas de surface de plancher au sens de l’article L. 112-1 du code de l’urbanisme ; que s’il prévoit en revanche une hauteur au-dessus du sol supérieure à douze mètres s’agissant du pylône, il ne ressort pas des pièces du dossier de la déclaration et n’est pas davantage établi par la société requérante que la plate-forme de plain-pied, destinée à accueillir les installations de téléphonie, soit, compte tenu de l’absence de projection verticale de son volume une construction développant une emprise au sol ; qu’en outre, il ressort de la déclaration de la société Orange France et notamment du plan de la zone technique DP2 que l’emprise au sol cumulée de l’antenne et des installations électriques comprenant un coffret et trois baies est inférieure à cinq mètres carrés ; que dans ces conditions, la société des Courses du Pays d’Auge n’est pas fondée à soutenir que les travaux projetés par la société Orange France ne relevaient pas du régime de la déclaration préalable ».

8. Tribunal administratif de Nîmes, 8 novembre 2013, Sté Orange France / Cne de Châteauneuf-de-Gadagne, req. n°1203081

Le Tribunal administratif de Nîmes juge que le silence gardé par le maire malgré une injonction de réinstruire prononcée au soutien de la suspension de l’exécution d’une décision d’opposition à déclaration préalable permet au déclarant de se prévaloir d’une décision tacite de non opposition un mois après la notification de l’ordonnance de référé.

Le Tribunal donne ainsi toute sa portée à l’injonction prononcée par le juge des référés (encore qu’un débat sur la date de naissance d’une décision tacite reste ouvert) et surtout au régime du silence valant autorisation qui s’applique classiquement en matière de déclaration préalable.

La décision d’opposition notifiée plus d’un mois après la réception de l’ordonnance de référé assortie de l’injonction équivaut donc à un retrait d’une non opposition tacite et est, dès lors, illégale (L. 424-5 du code de l’urbanisme).

9. Tribunal administratif de Rouen, 28 novembre 2013, Sté ORANGE FRANCE / Cne d’Hautot-sur-Mer, req. n°1201358

Le Tribunal administratif de Rouen était saisi d’une délibération comprenant plusieurs décisions dont notamment celle de résilier une convention d’occupation du domaine public conclue avec un opérateur de téléphonie mobile.

Le juge considère que la motivation de cette résiliation, liée à des plaintes de riverains pour des questions sanitaires ne saurait être regardée comme un motif d’intérêt général.

Il censure alors la délibération en ce qu’elle résilie la convention d’occupation du domaine public.

L’opérateur ayant présenté des conclusions tendant à la reprise des relations contractuelles, le Tribunal rappelle la gravité des vices dont est entachée la mesure de résiliation, constate l’absence de risque d’atteinte à l’intérêt général en cas de reprise de la convention et ordonne le retour à la situation contractuelle initiale.

Dans ses conclusions sur ce jugement, le rapporteur public était allé plus loin que ne le fait le Tribunal et avait admis que l’intérêt public attaché à la couverture du territoire par les réseaux de téléphonie mobile puisse également justifier la reprise des relations contractuelles.

10. Tribunal administratif de Grenoble, 30 décembre 2013, Société ORANGE FRANCE / Cne d’Ugine, req. n°1101456

S’il est acquis que les stations de téléphonie mobile sont des « ouvrages techniques et équipements nécessaires au fonctionnement des services publics » (Conseil d’Etat, 20 avril 2005, Sté Bouygues Télécom / AIPE, req. n° 248233) voire des « constructions strictement nécessaires au fonctionnement des services publics » (Conseil d’Etat, 30 juillet 2010, Association du quartier Les Hauts de Choiseul, req. n°328687), sinon même des équipements publics (Cour administrative d’appel de Nantes, 3 février 2012, Baudoin, req. n°10NT01244), certaines qualifications retenues par les POS/PLU restent encore à préciser.

Le Tribunal administratif de Grenoble était saisi d’une décision d’opposition à déclaration préalable pour une station de base fondée sur l’article 1 du règlement de la zone ND du POS de la commune d’Ugine dans laquelle était prévu le projet.

L’opérateur soutenait que son projet devait bénéficier de certaines qualifications prévues par cette disposition et qu’il était donc autorisé dans la zone.

Il prétendait notamment au bénéfice de l’article ND 1 2.3. du règlement du POS autorisant les « installations techniques nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles et touristiques. »

Le Tribunal fait droit à ce moyen et censure l’opposition du maire en jugeant « qu’un relais de radiotéléphonie est une installation technique nécessaire au fonctionnement de nombreux équipements personnels et professionnels utilisés notamment pour les activités agricoles et touristiques et participe au service d’intérêt général des télécommunications » (Tribunal administratif de Grenoble, 30 décembre 2013, Sté Orange France / Cne d’Ugine, req. n°1101456).

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